LES ROYAUMES DES MARCHES – TAD WILLIAMS

L'AUTEUR

Robert Paul Williams dit Tad Willams est né le 14 mars 1957 à Palto Alto près de San Francisco. Il a exercé de nombreux métiers : chanteur et parolier d'un groupe de rock, présentateur de radio et de télévision, employé d'Apple et fondateur d'une compagnie de production de technologies inter-actives pour la télévision.

Passionné de Fantasy et de Science-Fiction, malgré une situation professionnelle instable, il commence à écrire de courts textes et prend l'activité d'écrivain au sérieux quand est publié son premier roman Tailchaser's Songs est publié en 1985, un roman de fantasy qui envisage le monde selon le point de vue des chats. Il commence donc, à l'âge de vingt-cinq ans la Ligue du Parchemin, premier volume de l'Arcane des Épées, publié en 1988. Il devient alors une étoile montante de la fantasy épique. Il poursuit l'écriture de la saga, qui comprend trois volumes originaux. Basculant ensuite dans la Science-Fiction, il écrit un cycle baptisé Autremonde, sur la thématique centrale des réalités virtuelles.

Avant de revenir à la high fantasy avec les Royaumes des Marches, à l'origine un cycle écrit pour la télévision, il a écrit La Guerre des Fleurs, un roman au ton humoristique qui se place dans une réalité parallèle où vivent des créatures féeriques en tout genre. 

TOME 1 CHÂTEAU D'OMBRE 1

Jadis, au terme d'une guerre sans merci, la race humaine parvint à repousser les Qars, le Peuple du Crépuscule, à l’extrême nord des Royaumes des Marches. Dans leur retraite, les Qars érigèrent une barrière qui, sans pour autant arrêter les humains, confondait leurs esprits et les ensorcelait. Les mortels finirent par renoncer au combat et décrétèrent que cette zone brumeuse, qu'ils appelaient la Ligne d'Ombre, marquerait à l'avenir la nouvelle frontière entre les deux peuples.

Bien des siècles plus tard, cet armistice de fait semble sur le point de prendre fin : la Ligne d'Ombre a commencé à se déplacer, augurant sans doute d'une reprise prochaine des hostilités. Alors que la menace d'une invasion Qar se précise, le chaos s'empare de Château d'Ombre, premier rempart des forces humaines bâti à proximité de la Ligne.... 

Avec Château d'Ombre, l'auteur revient à la fantasy épique : le Bien contre le Mal.

Un cadre médiéval assez classique, le monde qui nous est présenté ne surprendra pas le lecteur ; l'auteur prend son temps pour poser, avec qualité, son univers aussi bien géographique que politique : des ingrédients solides. Si le cycle est simple, le fait de côtoyer deux mondes différents, presque parallèles, la Ligne d'Ombre faisant office de portail, est très agréable car on voit cet autre monde de son propre point de vue. Comme d'habitude, l'univers de l'auteur est bien détaillé et diversifié, l'intrigue intéressante mais qui traîne quelque peu en longueur, il semblerait que l'auteur ait voulu écrire un plus nombre de tomes sans pour cela ajouter d'événements intéressants : il s'attarde trop sur les sentiments de chacun au détriment de l'action. Mais force est de constater, que malgré de nombreux coups de théâtre, que le roman a du mal à démarrer : intrigues de palais, découpage de la narration en petits chapitres à l'intérieur du chapitre lui-même, un bestiaire pauvre manquant cruellement de diversité... c'est long même pour un premier volume de mise en condition, même si l'auteur use parfaitement de sa science et d'un enthousiasme palpable qui malheureusement n'arrive pas à faire vivre comme il se devrait un Château d'Ombre où de nombreux personnages y réside : l'effervescence d'un tel château ne transpire pas.

A l'instar de l'Arcane des Épées, l'intrigue est composée de multiples histoires dans l'histoire., car Château d'Ombre est une entité presque vivante où se tisse bien des destins aux trajectoires attendues mais qui arrivent parfois à surprendre le lecteur. Alors qu'en secret la guerre se prépare avec les Qars, la forteresse de Château d'Ombre, première cité derrière la Ligne d'Ombre est en proie au chaos. Le roi Olin a été honteusement trahi et fait prisonnier par le souverain d'un royaume voisin. Alors que le fils aîné du roi, devenu régent, tente de réunir les fonds de la rançon, il est mystérieusement assassiné dans ses appartements, laissant la gestion du royaume aux jumeaux, Barrick et Briony, âgés de seulement quinze ans. C'est pourtant sur leurs frêles épaules que résident les négociation afin de faire libérer leur père, mener l'enquête sur l'assassinant de leur frère aîné, de faire face aux complots qui se trament pour les évincer du trône et à la future invasion des Qars.

Le prince Barrick, l'ombrageux prince des Marches, est un être torturé par des rêves effrayants qui peuplent ses nuits et détériore sa santé et manquent de le rendre fou. Avec le fardeau de ses lourds secrets, il attire d'emblée l'empathie du lecteur. En revanche, sa sœur apparaît, au début du roman, comme le cliché d'une enfant gâtée qui cherche à s'émanciper avide de chevauchées et autres activités masculines. Mais au fil des pages, elle mûrit, et plus tard le lecteur découvre une jeune fille qui a la tête sur les épaules et dont la force de caractère, et les idées narratrices font d'elle, à l'inverse de son frère, une parfaite femme d’État.

Un tome court, qui malgré un indéniable manque d'action, comme souvent dans les premiers opus qui installent les personnages et l'intrigue, donne envie de continuer la suite de la saga.

TOME 2 CHÂTEAU D'OMBRE 2

Château d'Ombre est en proie au chaos : son souverain a été capturé par un royaume rival, tandis que le régent a été assassiné dans de mystérieuses circonstances. Leurs disparitions laissent seuls le jeune prince Barrick, héritier du trône hanté par d'étranges rêves, et sa sœur jumelle l’entêtée princesse Briony, face à la plus grande menace que l'humanité ait eu à affronter depuis des siècles.

Car tandis que l'armée des Qars se met en marche, prête à en découdre avec ceux qui jadis, ont brisé la trêve entre les deux espèces et on repoussé le Peuple du Crépuscule au-delà de la Ligne d'Ombre, le sombre empire de Xand étend inexorablement son influence sur l'ensemble des Royaumes des Marches, au risque d'empêcher la nécessaire alliance de toute la race humaine face au conflit sans merci qui s'annonce.....

TROP DE MISE EN CONTEXTE

Avec la deuxième partie du premier tome original, l'auteur poursuit son incursion dans un monde en train de changer radicalement, mais ne vous attendez pas à d'épiques escarmouches car l'auteur continue d'installer le cadre des événements et le futur conflit.

L'auteur puise dans le Trône de Fer puise pour le mode narratif séquentiel et comme dans celui- ci instille un climat permanent de peur et de doute, auquel le lecteur se laisse facilement prendre. L'alternance entre les différents protagonistes est tout à fait la bienvenue, même si les les transitions interviennent dans un même chapitre ce qui peut déconcerter un lecteur non averti. En effet, cette alternance permet de de connaître ce qui se passe dans les différentes parties du monde, de disposer de plusieurs points de vue sur la situation et de découvrir les références à certaines mythologies.

Le lecteur appréciera tout particulièrement le mystère qui plane autour du Peuple du Crépuscule qui n'a apparemment rien d'humain, mais pourra également regretter que les scènes de l'autre côté de la frontière sont très rares.

Dans cette première partie des Royaumes des Marches l'auteur use de sa science parfaitement maîtrisée et d'un enthousiasme palpable afin de ménager une tension de visible par tous les lecteurs qui seront transportés par le talent de conteur de l'histoire et seraient ravis d'écouter cette histoire au coin du feu. Toutefois l'auteur ne donne pas assez d'information pour que lecteur puisse adhérer complètement à l'histoire. Le style de l'auteur, par rapport à son autre série de fantasy L'Arcane des Épées est susceptible de décevoir le lecteur car il donne l'impression de tirer sur chaque bout de phrase pour donner du volume à son histoire. De surcroît les transitions entre chaque personnage interviennent dans le même chapitre ce qui peut être déroutant pour le lecteur. Mais le livre reste plaisant et permet de passer un bon moment de lecture.

Tome 3 THÉÂTRE D'OMBRE 1  

Une année plus tôt, les Royaumes des Marches étaient en paix, la famille Eddon régnait sur Château d'Ombre et tout se passait pour le mieux du monde.

A présent, le roi Olin est retenu captif dans une contré lointaine ; son héritier Kendrick , a péri sous les coups d'une magie traîtresse. Quand à Barrick et Briony, les deux jumeaux royaux, le sort a fini par les séparer. Car partout dans le nord, le Peuple du Crépuscule, mené par la prêtresse guerrière Yasammez a étendu son empire. D'anciennes magies ont commencé à s'agiter depuis la Ligne d'Ombre, en prélude à la bataille sanglante a opposé les féroces créatures à l'ultime bastion humain de Château d'Ombre. Contrainte de fuir seule , la princesse Briony va rencontrer autant d'alliés inattendus que d'ennemis mortels au cours de son périple, et découvrir que les familles et les nations peuvent dissimuler de biens sombres secrets.... 

Tome 4 THÉÂTRE D'OMBRE 2  

Les fils du destin se mêlent et s'entrecroisent au cœur des Royaumes de Marches.

Retenu prisonnier et conduit dans les profondeurs de la terre, le jeune prince Barrick découvre que le demi-dieu Jikuyin fait dégager la Porte des Enfers pour s'approprier un objet appartenant à Kernios, le dieu de la Mort, et qu'il compte sacrifier le jeune homme afin que son sang déverrouille l'ouverture.

De son côté, Briony sort des grands bois et erre sur les chemins lorsqu'elle fait la rencontre de comédiens ambulants, qui acceptent de l'intégrer à leur compagnie. La troupe se rend jusqu'à Tessis où les autorités les arrêtent presque aussitôt pour espionnage, obligeant la princesse à leur révéler sa véritable identité.

Entre temps, l'autarque de Xis, Sulepis, a embarquée avec son armada pour aller assiéger Hiérosol, où le roi Olin est toujours retenu prisonnier. La cité sous le siège semble sur le point de tomber. 

Théâtre d'ombre est la suite directe de Château d'ombre, le deuxième tome de la trilogie Les Royaumes des Marches. On y retrouve donc les mêmes ingrédients et qualités que dans le précédent volume.

Dans cette deuxième partie de son cycle, l'auteur, comme dans Château d'Ombre s'attache à son rythme, c'est-à-dire avec le souci du détail parfaitement maîtrisé et donne l'impression de traiter son intrigue comme une araignée tisse sa toile. De part sa manière de procéder, tout comme dans son cycle précédent l'Arcane des Épées, l'auteur démontre une fois de plus ses qualité de conteur et sa capacité à créer des univers à la fois complexes et cohérents, à défaut de développer des intrigues véritablement originales.

Si l'intrigue n'est pas des plus originales, il faut constater que l'univers l'est nettement plus avec cette race non humaine qui occupait autrefois la majeure partie de cet univers, et qui compte bien le reconquérir ; les faîtiers et les farfouilleurs, petites créatures occupant respectivement, et discrètement, les toits et les sous-sols de Château d'ombre ; et enfin ce panthéon de dieux et demi-dieux qui interfèrent dans les destins de cette multitude de protagonistes.

Dans ce cycle des Royaumes des Marches, l'auteur s'attache plus à poser son univers, son intrigue géopolitique, ainsi que les complots en cours et à venir plutôt qu'à ses personnages par trop importants et parfois le lecteur perd le fil des nomsgénérant chez le lecteur un léger manque d'empathie avec les protagonistes principaux. Et le lecteur s'attache plus à des personnages extérieurs qu'aux jeunes héritiers en pleine crise d'adolescence.

Si le cycle est plus simple que d'autres, notamment l'Assassin Royal de Robin Hobb, le fait de côtoyer deux mondes différents, presque parallèles, est la force principale du cycle car il est permis au lecteur de voir l'univers et l'intrigue de deux manières radicalement opposées.

Après L'Arcane des Epées, qui avait établi, à son époque, son auteur comme l'un des maîtres de la High-fantasy contemporaine, Tad Williams revient à ses premières amours pour nous offrir avec Les Royaumes des Marches un cycle ambitieux, complexe, d'une rare finesse, qui prouve si besoin l'était que Williams reste l'un des meilleurs écrivains américain de fantasy.